LE DONJON (XIIèmesiècle)
Le donjon de Chambois faisait partie d'un château de plaine destiné à verrouiller la vallée de la Dives.
On en attribue la construction à Guillaume de Mandevielle, mort en 1189, vassal du roi Henri II Plantagenêt.
C'est un donjon de type roman, quadrangulaire, de 24 sur 17 mètres, avec des contreforts d'angle, qui constituent
des tourelles carrées avec des petites salles à chaque étage.
Cette particularité, ainsi que la tour qui est accolée sur le flanc Sud-Est, et où se situe, à 6 m, l'entrée du donjon,
montrent une analogie directe avec certains donjons anglais, notamment ceux de Rochester et de Castle Rising.
Le donjon, depuis le sol jusqu'à l'entablement des guérites d'angle, a une hauteur de 25,70 mètres.
Ses murs ont 3,10 mètres d'épaisseur, ou 4,10 mètres en comptant le glacis de base.
Protégé à l'origine par de solides barres de fer, les larges fenêtres qui s'ouvrent aux deux étages,
marquées par des cordons de pierre, témoignent du soin apporté au confort et à la décoration des appartements seigneuriaux.
Séparés par une élégante colonnette, leurs baies géminées en plein cintre sont réunies au premier étage sous un grand
arc brisé et un tympan orné d'une tête sculptée.
A l'intérieur, on peut aisément restituer les planchers disparus à partir des grandes cheminées à manteau de pierre
et des consoles sculptées de morillons, qui, à la base du second étage, supportaient le solivage.
Le donjon, avec ses défenses complétées par une enceinte renforcée de tours dont les vestiges ont subsisté jusqu'au XVIIIe siècle,
semblait, lors de sa construction, formidable.
Alors, seuls étaient en usage, avec l'arme blanche, les engins à ressorts (arcs et arbalètes).
Mais le perfectionnement des moyens d'attaque fit apparaître les réelles faiblesses de ce donjon,
qui résultaient d'une insuffisance de flanquements dûe au peu de saillie des contreforts d'angle.
Pour y remédier, à la fin du XVe siècle, le couronnement fut remanié.
On ajouta un escalier à vis dans la cour d'entrée, qui fut surélevée comme les courtines, dotées d'un quatrième étage
correspondant à une galerie ouverte, munie de meurtrières et d'un chemin de ronde avec parquet crénelé sur machicoulis de pierre.
Quant aux tourelles d'angles, elles reçurent un sixième niveau, pourvu de cheminées et percé de fenêtres,
fermées par des volets de bois pivotants.
Le donjon de Chambois est considéré comme l'un des mieux conservés de son époque.
Il fut classé Monument historique au début du XXe siècle.
Histoire
Confié en 1204 par Philippe Auguste à son maréchal Henri 1er Clément, le château appartint
successivement aux Chambly, puis aux Tilly, tomba en 1363 aux mains de Charles le Mauvais, roi de Navarre,
qui dut le restituer à la suite de la bataille de Cocherel, remportée par Duguesclin en 1364.
En octobre 1417, Jean de Tilly et ses compagnons furent contraints de capituler devant les troupes du roi d'Angleterre, Henry V. Ce dernier
donna la place à son chambellan, Henry FitzHugh. Les Anglais en partirent en 1449, et Guillaume de Tilly, fils de Jean, recouvra le château.
En 1568, Pierre de Rosnyvinen, Seigneur de Chambois, occupé à défendre Argentan, ne put s'opposer à Gabriel de Montgommery,
qui s'empara du château à la tête d'une troupe de Huguenots. Gaspard de Saulx-Tavannes, envoyé par Catherine de Médicis,
tenta vainement de réduire le donjon et brûla le bourg.
Après la défaite de Montgommery à Domfront et son exécution en 1574, Pierre de Rosnyvinen rentra en possession du château.
Aux de Rosnyvinen succédèrent les d'Erard, barons de Ray.
Le dernier seigneur de Chambois fut celui d'Heudreville, marquis de Graveron en 1743.
Disparu de l'histoire, le donjon de Chambois, d'héritages en ventes successives, connut de nombreux propriétaires.
En 1958, Monsieur BOULAIS, ancien maire de Chambois, en fit don à la commune, laquelle, en 1989, le céda au département.